« Je comprends l’angoisse de celui qui a perdu une personne très aimée, un conjoint avec lequel il a partagé beaucoup de choses. » Pape François, La Joie de l’Amour – N° 254

La mort de l’un des époux, et le veuvage qui en découle, sont des réalités qui concernent, à un moment ou l’autre, la plupart des couples. C’est une étape de la vie conjugale. 

Devenir veuf, veuve

Après l’annonce du décès, brutalement ou suite à une maladie, le « survivant » ressent un grand vide (sens du mot « veuf »), une mutilation. Il entre dans un nouvel état qui l’exclut du groupe social des couples.

La tristesse envahit la personne veuve, avec le manque de plus en plus pesant, les souvenirs très présents, et toutes sortes de culpabilités. Bien sûr le quotidien est modifié : repas, finances, organisation matérielle… La solitude est grande, surtout les dimanches. Il faut faire face à de nombreuses formalités et aux tâches que l’autre accomplissait. Le veuvage n’est pas une maladie, mais ses répercutions sur le corps nécessitent de l’attention.

La vie du conjoint s’est arrêtée ; celle du couple aussi. Le partage de dialogue, de tendresse et de complicité n’existe plus. Il faut décider seul pour tout. L’absence de projets à deux est particulièrement douloureuse. Et puis il y a l’angoisse de l’avenir : éduquer les enfants, vieillir seul… 

Une nouvelle relation aux autres

Comme toute épreuve, l’expérience du veuvage transforme la personne : sa manière de regarder, de penser, d’agir ; les priorités changent. L’entourage vit aussi le deuil et observe : réactions, larmes et fréquentations sont scrutées. Les proches veulent d’abord protéger le veuf ou la veuve ; ensuite ils ont hâte qu’il passe à autre chose.

Chacun vit le deuil à son rythme, selon son caractère, sa foi et le lien tissé avec la personne décédée. Souvent les amis du couple prennent de la distance, comme s’il y avait risque de contagion, ou par peur… Le nom du défunt n’est plus prononcé, alors que cela ferait du bien de pouvoir parler de lui et d’évoquer les souvenirs.

Il faut du temps et beaucoup de patience. Oser rejoindre d’autres personnes veuves dans un groupe de réflexion permet de s’exprimer librement et trouver écoute et encouragement.

 Continuer la vie

Le deuil travaille la personne et transforme, jour après jour, le lien conjugal. Une présence intérieure de l’être aimé s’installe dans l’intime. L’attachement d’amour continue dans la communion des saints.

Au fil des mois et des années, les objets du défunt sont triés, donnés, rangés. La fidélité se vit dans la relecture pacifiée du passé, dans les oui quotidiens, dans les relations avec les enfants et avec la famille élargie comme cela est possible ; elle peut se vivre aussi dans une activité pour soi-même ou un service à la paroisse ou à la société, dans une nouvelle vie de couple ou dans le veuvage consacré.

L’alliance est au cœur de la prière, et l’eucharistie demeure pour beaucoup le lieu principal de communion avec l’être aimé.

 Veufs et veuves dans l’Eglise

Le veuvage éprouve la foi comme le creuset éprouve l’or. Les personnes touchées par la mort rappellent à l’Eglise que la foi n’est pas certitudes et pieuses formules : elle se forge pas à pas, pauvrement, dans les tâtonnements arides d’un vécu humain. Baptisés, les veufs témoignent que la foi n’est pas une assurance tous risques mais un dépouillement : au pied du mur de leur souffrance ils approchent avec humilité le Dieu présent aux nuits et aux doutes, un Dieu qu’on ne possède pas ; ce Dieu que Marie-Madeleine désire retenir au matin de Pâques mais qu’elle doit laisser aller, car il est vivant et l’envoie vers une nouvelle mission.

Les veufs sont signes d’espérance. Avancer est un défi par amour. La foi ne fait pas oublier l’absence ; l’absence ouvre une autre présence et appelle à croire et à vivre autrement, dans l’attente des Retrouvailles avec tous ceux qui nous précèdent dans ce Passage, pour vivre pleinement la Joie de l’Amour.

Sylvie Simon Présidente nationale mouvement « ESPERANCE ET VIE »