Le mois de novembre est accompagné des sentiments nostalgiques de l’automne : les feuilles tombent, le vent s’engouffre dans les manteaux qu’on vient juste de ressortir, les jours raccourcissent, le ciel gris et lourd pèse sur nos têtes comme un couvercle. Et, cette année, comme si cela ne suffisait pas, le spectre de la covid-19 reste omniprésent : les visages masqués, l’exigence du « passeport sanitaire » dans certains lieux de socialisation… Enfin, l’actualité achève d’assombrir ce climat déjà morose : le rapport de la CIASE avec ses révélations sidérantes des abus sexuels commis au sein de l’Eglise.
La liturgie de ce début du mois, en nous invitant à la commémoration de tous nos défunts, n’a pas pour intention de rajouter une couche à ce tableau déjà sombre. Se souvenir de tous ceux qui nous ont quittés, évoquer la mort, ce n’est pas seulement s’interroger sur notre fin de vie ou sur la manière de mourir : faut-il mourir sans douleur, en la voyant venir, ou au contraire par surprise, rapidement ou de longue maladie ? Evoquer le souvenir de nos défunts c’est surtout s’interroger sur nos raisons de vivre, sur le sens de notre vie.
Parmi tous ces souvenirs, l’Eglise nous invite à évoquer celui des saints. C’est-à-dire ces femmes et ces hommes que l’évangile de la Toussaint, qualifie de « bienheureux ». Trop souvent nous résumons le bonheur à une satisfaction sensible, une réussite affective ou professionnelle, un moment de fête partagé. Mais le bonheur proposé dans les Béatitudes est d’un tout autre ordre. Il émane d’un accord profond avec soi-même, une harmonie qui vient du fait qu’on se sent « ajusté » à ses convictions les plus fortes, en cohérence avec ce qu’on désire le plus profondément. C’est pourquoi l’évangile appelle bienheureux « ceux qui pleurent », les « artisans de paix », ceux qui « œuvrent pour la justice », « les persécutés », etc.
En célébrant, le 11 novembre, la journée nationale du souvenir, nous posons un acte de mémoire non seulement envers les glorieux soldats morts pour la France pendant la première guerre mondiale, mais aussi envers toutes les victimes des guerres et des conflits incessants. Que, par l’intercession de saint Martin, soldat de la charité, le Christ Roi de l’Univers que nous célébrerons le 21 novembre, nous donne la grâce de bâtir la paix au jour le jour et la force de ne pas nous décourager devant le spectacle cruel du monde.
Père Jean-Paul