Ce quatrième dimanche de Pâques est appelé dimanche du Bon Pasteur. A l’occasion, la liturgie nous propose de beaux récits bucoliques dont le pittoresque ne peut manquer de charmer même les cœurs les plus engourdis. Au sujet du psaume 23 par exemple, Henri Bergson écrivait : «Les centaines de livres que j’ai lus ne m’ont pas donné autant de réconfort que le Psaume 23 : «Le Seigneur est mon berger, je ne me manque de rien; Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi, ton bâton me guide et me rassure.»
Malgré toutes nos revendications d’indépendance et d’autonomie, nous avons besoin d’être guidés vers une vie pleine et entière. Saint Bernard le dit excellemment : « Qui se gouverne lui-même se fait le disciple d’un sot ».La vie est trop compliquée pour que nous puissions la traverser seul, en toute sécurité. Nous avons besoin d’être guidés et d’être protégés. Le Christ nous montre le chemin et nous assure sa protection contre tout ce qui pourrait nous faire du tord et nous détruire.
Nous pouvons bien sûr suivre d’autres guides, et beaucoup se présentent à nous comme des «sauveurs providentiels», mais Jésus nous met en garde : «attention! Si vous les suivez, vous risquez d’être trompés». Des vendeurs d’illusions nous promettent un corps parfait, sain, toujours jeune grâce à une médecine de pointe, d’autres font miroiter à nos yeux un bonheur facile et instantané garanti par les biens matériels et nous font rêver d’un avenir assuré par des placements en bourse ou des assurances. Mais, avec la crise sanitaire et économique que traverse actuellement le monde, nos illusions volent en éclats et nous nous rendons compte de la fragilité de ces promesses.
Dans l’Evangile de ce dimanche, Jésus se présente comme le guide, le passage, la porte qui donne accès à un monde meilleur. Derrière cette porte, il n’y a pas un Dieu qui fait peur, un Dieu qui juge, un Dieu qui exige des performances herculéennes, mais un Dieu qui aime, qui pardonne, qui accueille le fils prodigue, la femme pécheresse, les publicains Lévi et Zachée, le bon larron, Pierre repenti, Paul le persécuteur… Derrière cette porte se tient le Bon Pasteur qui, à la tombée de la nuit, n’ayant pas vu toutes les brebis rentrer, va à la recherche de la brebis perdue et ; l’ayant retrouvée, la prend sur ses épaules et la ramène au bercail.
L’image de « la porte des brebis » signifie que la bergerie n’est pas une prison. On y entre et on en sort. Le berger n’est pas un redoutable garde-chiourme. Il est là pour favoriser les aller et venues de chacune des brebis. Il est là pour leur bien-être, « pour qu’elles aient la vie, et qu’elles l’aient en abondance. »Telle est aussi la mission, non seulement des pasteurs de nos Églises, mais de tous ceux qui ont une responsabilité sur des humains, aussi bien dans l’ordre social, politique, économique que religieux.
Souvent, nous sommes enfermés dans une sorte de «huis clos», bloqués à cause d’une maladie, d’un complexe, d’un traumatisme, d’une addiction à l’alcool, au jeu, à la drogue ou à cause de notre entourage. Nous avons tous, un jour ou l’autre, à faire face à des problèmes qui semblent sans issue. Nous nous sentons au pied du mur, emprisonnés, ne sachant comment nous en sortir.
C’est alors que le Christ intervient et nous dit qu’il est la porte. Parce que, dans le mur de notre misère humaine et de nos confinements existentiels, il peut toujours ouvrir une brèche, une issue. La porte devient ici l’image de la liberté, l’image de la vie. Suivre Jésus n’est pas, comme d’aucuns le pensent, vivre une vie à moitié, c’est au contraire vivre pleinement avec celui qui a dit : «Je suis venu pour que vous ayez la vie et l’ayez en abondance.»
Père Jean-Paul